Dépendance: un chantier inachevé attend le prochain locataire de l’Elysée

Crédit AFP/Archives – By GEORGES GOBET

Permettre aux personnes âgées d’assumer le coût des maisons de retraite, pallier le manque de personnel ou soulager les aidants familiaux: le chantier de la dépendance, engagé par François Hollande mais inachevé, attend le prochain locataire de l’Elysée.

– Quelles sont les projections démographiques?

Un habitant sur quatre aura 65 ans ou plus en 2040, selon l’Insee. Dans cette tranche d’âge, 8% seulement des seniors affrontent la perte d’autonomie, celle-ci survenant en général au-delà de 80 ans, rappelle le sociologue Serge Guérin.

En 2040, les personnes âgées de plus de 75 ans représenteront près de 15% de la population contre 9% actuellement.

Alain Villez, président des Petits frères des Pauvres, estime que les candidats font des propositions « trop parcellaires » face à cet enjeu. « On va se trouver face au problème dans toute son acuité, et on n’aura pas anticipé ».

– Qu’est-ce qui a été fait?

Nicolas Sarkozy en 2007, puis François Hollande en 2012, s’étaient engagés à faire une grande réforme de la dépendance.

Elaborée par le gouvernement de Jean-Marc Ayrault, la loi sur « l’adaptation de la société au vieillissement », dotée de 700 millions d’euros par an, est entrée en vigueur début 2016. Sa mesure phare est la revalorisation de l’Allocation personnalisée à l’autonomie (APA) pour les personnes âgées résidant à domicile.

Pour des raisons budgétaires, l’exécutif a renoncé à une deuxième étape, qui devait porter sur les maisons de retraite. Leur coût moyen mensuel a été évalué à 2.200 euros (Igas 2009), alors que la pension moyenne des près de 16 millions de retraités en France est de 1.300 euros bruts (Drees 2014).

– Quel financement proposent les candidats?

Marine Le Pen (FN) promet de créer une 5e branche de la Sécurité sociale pour la dépendance, mesure chiffrée par l’Institut Montaigne à 9 milliards d’euros par an.

Jean-Luc Mélenchon (La France insoumise) veut également « une prise en charge solidaire », en mettant à contribution les revenus immobiliers et les successions sur les gros patrimoines. Le socialiste Benoît Hamon, qui propose de créer un « panier de services publics +bien vieillir+ » de proximité, promet d’investir « 3 milliards d’euros en année pleine ».

Le candidat de la droite François Fillon préfère encourager, par des incitations fiscales et une labellisation, la souscription d’assurances dépendance privées, et inciter à l’épargne-autonomie.

Emmanuel Macron (En Marche!) entend s’appuyer en premier lieu sur la solidarité nationale, mais n’écarte pas des solutions complémentaires telles que l’épargne, selon son équipe.

– Quelles mesures concrètes?

Plusieurs candidats propose d’augmenter l’APA: Marine Le Pen, Benoît Hamon (+30% pour le domicile) et Jean-Luc Mélenchon (+50%).

Pour les maisons de retraite, Benoît Hamon créerait une allocation unique « bien vieillir » proportionnelle aux moyens de chacun, pour couvrir une partie du coût d’hébergement. Jean-Luc Mélenchon promet de réduire le « reste à charge » de 500 euros par mois, et de développer un réseau public d’établissements à tarifs accessibles, avec 50.000 places créées en cinq ans.

François Fillon et Benoît Hamon prévoient d’adapter au vieillissement 150.000 logements supplémentaires (après 100.000 sous le quinquennat Hollande).

François Fillon veut faire de l’aide aux personnes âgées « une priorité » du service civique, étendu pour cette action spécifique aux plus de 25 ans.

Emmanuel Macron fait valoir que sa proposition de suppression des charges au niveau du Smic pour tous les salaires permettra à l’APA de payer devantage d’heures d’aide à domicile.

– Et le personnel?

Jean-Luc Mélenchon promet de former et recruter au moins 100.000 personnes, et de refondre les grilles de rémunération pour valoriser les métiers de prise en charge de la perte d’autonomie.

Benoit Hamon dit vouloir augmenter de 3 à 5 le nombre d’aides-soignants par Ehpad. François Fillon promet un plan de professionnalisation des aides à domicile.

– Que faire pour les aidants familiaux?

Plus de 8 millions de personnes aident au quotidien un proche malade, âgé ou handicapé.

François Fillon dit vouloir doubler, jusqu’à 1.000 euros par an, le « droit au répit » instauré en 2016.

Emmanuel Macron, comme François Fillon, veut permettre le don de RTT entre salariés (déjà institué pour les parents d’enfants gravement malades) et prendre en compte la situation des aidants dans le calcul de l’âge de départ à la retraite. Il veut par ailleurs favoriser leur formation et droit au répit.

Avec AFP

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