Marine Le Pen et Emmanuel Macron, pôles contraires

Crédit AFP/Archives – By Joël SAGET, Eric Feferberg

Ils se disputent le terme de « patriote », s’affichent chacun comme l’incarnation du renouvellement d’une classe politique à bout de souffle. Mais le pro-européen Emmanuel Macron et la nationaliste Marine Le Pen proposent aux Français un avenir que tout oppose.

Emmanuel Macron, nouveau en politique, inconnu des Français il y a encore peu, a créé de toutes pièces son mouvement, « En marche! ». Marine Le Pen qui a hérité de son père son parti, le Front national, a personnifié son propre mouvement « Le rassemblement bleu Marine » pour conquérir le pouvoir.

Dans un pays qui traverse une crise d’identité sur fond de chômage et de menace terroriste, chacun se revendique « patriote ».

Avec son slogan « au nom du peuple », Marine Le Pen, 48 ans, se présente comme la candidate des « patriotes contre les mondialistes ». Emmanuel Macron, 39 ans, s’affiche comme le « candidat des patriotes contre les nationalistes ».

Dans leurs meetings, leurs partisans agitent avec fierté et enthousiasme des drapeaux français, l’hymne national ponctue la fin de leurs discours.

Les deux candidats citent aussi volontiers le général de Gaulle, héros de la résistance française sous l’occupation nazie, pour appeler leurs partisans à la liberté. Tous deux exaltent le destin national, l’Histoire de France, ses écrivains, ses faits de gloire…

Et tous deux veulent mettre fin au traditionnel clivage entre les deux grands partis qui définit la vie électorale française depuis plus d’un demi-siècle. Dimanche, ils ont créé ensemble le choc au premier tour en éliminant sans appel de la course présidentielle, la droite (Les Républicains) et la gauche (Parti socialiste).

Quand Marine Le Pen appelle à en finir avec « la droite du fric et la gauche du fric », Emmanuel Macron se dit « ni de droite ni de gauche » et veut « changer de logiciel ». Et tous deux se disputent une étiquette « anti-sytème »

– « Anti-système » –

L’avocate de formation, qui a repris le flambeau de son père en 2011 à la tête du parti Front national créé en 1972, participe depuis plus de quinze ans à la vie politique française. Elle est eurodéputée.

Pur produit des écoles de l’élite française, l’ex-banquier d’affaires Emmanuel Macron est entré en politique en 2012 comme conseiller du président socialiste François Hollande avant de devenir ministre de l’Économie (2014-2016).

« J’ai entendu les doutes, la colère, les peurs du peuple de France, sa volonté de changement », a-t-il lancé dimanche en se disant déterminé à « rompre jusqu’au bout avec le système qui a été incapable de répondre aux problèmes ».

Ce positionnement lui attire des attaques régulières de l’extrême droite – Jean-Marie Le Pen l’a décrit dimanche soir comme un « candidat du système ».

« Le vieux front républicain tout pourri, dont plus personne ne veut, que les Français ont dégagé avec une violence rare, essaie de se coaliser autour de M. Macron. J’ai presque envie de dire tant mieux! », a ironisé lundi Marine Le Pen, en moquant les appels de tous bords à lui « faire barrage » pour le deuxième tour, le 7 mai.

Quand l’un prône une Europe plus forte, l’autre veut négocier à Bruxelles la sortie de l’euro et de l’espace Schengen et propose un referendum sur l’appartenance à l’Union européenne. L’une bannirait voile et burkini de l’espace public, l’autre non. L’une veut abolir une loi libéralisant le code du travail, l’autre non.

Le discours d’Emmanuel Macron, libéral en termes d’économie et de société, plaît surtout aux jeunes urbains, aux classes moyennes et milieux d’affaires. Celui anti-immigration et anti-Europe de Marine Le Pen attire les classes populaires, les ruraux, les « invisibles » et capte le ras-le-bol des Français victimes d’un chômage endémique.

L’ambiance de leur meeting est aussi aux antipodes. Il prône une « France ouverte, confiante et conquérante » à laquelle il veut rendre son « optimisme », elle promet de répondre aux peurs liées à l’immigration, l’islam et la sécurité pour « la défense de notre civilisation ».

Les partisans de Marine Le Pen parlent de « démonstrations de force », sifflent les adversaires, scandent « On est chez nous ». Emmanuel Macron, sourire aux lèvres, voit dans les foules une « démonstration d’envie » et prévient son public: « Mes amis, ici on ne siffle pas ».

Avec AFP

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